Repérages-Groenland

juillet 15, 2011

Présupposé

Enregistré dans : Groenland mon amour — agnes @ 7:06 pm

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Détruisons Internet
Nous pouvons détruire Internet, simplement. Il suffit de quelques gus dans un garage déterminés à ceci. La destruction est possible. Et nous programmerons cette fin au service de la culture et de la pensée. C’est inévitable. La destruction qui vient est inévitable et indispensable. Médée. Oui, assassiner ses propres enfants, cela existe. Ce n’est pas une simple fiction reproduite à l’envi. Ni même un mythe. C’est une issue, la seule. Car nous tous, ennemis virtuels désignés ainsi par le pouvoir ignorant et vulgaire, ne pouvons plus laisser la puissante machine princière nous asphyxier de cette sorte sans même nous laisser ce laps de temps, celui de la souffrance peut-être, celui de comprendre que nous ne penserons plus, que tout s’est inversé. Nous détruirons ce pays supplémentaire, cet Internet, non par non amour, mais à l’égal de Médée, par amour extrême ou impossible.

Alors donc, cette impasse, celle de l’ignorance et de la maltraitance de ce territoire numérique, et à son sujet, jamais tant de sociologues et de spécialistes morts-nés de l’Internet en ont écrit le sort. Nicolas Carr et son manifeste de 2 pages « Is Google Making Us Stupid ? » absorbe en quelques mois 1010000 vues, c’est-à-dire 1010000 lectures ou clics de personnes intéressées par le sujet. JE SUIS TON PERE. La pensée se limiterait donc à la seule circulation de 4500 signes en 2010 ? L’esprit critique référencé de cette sorte ? Oui, la France affecte cette forme précise et vulgaire de l’abandon de l’esprit. Et la France, sophistiquée et cultivée, qui longtemps s’est couchée de bonne heure, se lève aujourd’hui corps et âme supervitaminés et joggant contre l’esprit, contre l’accès à la culture, contre la pensée, et la France désigne, uniformes empruntés, l’ennemi virtuel de toute part, ailleurs et ailleurs - MOI, TOI et tous les AUTRES, criminels, pirates, révisionnistes, sexistes et pédophiles de surcroît. VIGILANCE nous dit-on tous les 10 mètres depuis des années et ce feu plan vigipirate (c’est écrit en noir sur tous les sacs poubelles verts et transparents de la Ville de Paris). Vigilance mon amour. J’ai peur.

Nous avons des armes, infaillibles, des armes immatérielles, composées de 0 et de 1. Nous avons pensé ce web, nous avons construit ce territoire, ce truc improbable, ce pays supplémentaire (ils disent espace public). Il ne nous échappera jamais. Nous le détruirons, nous livrerons les clefs de notre Enfer à quiconque pour que nul n’y soit cloisonné et proscrit ou étranger. L’ennemi virtuel n’existe pas, c’est une fabrication mentale, grossière et grotesque d’un pouvoir ignorant et imbu de sa petite personne princière. Internet est ce pays supplémentaire, le nôtre, celui que nous avons tant attendu, ce pays pressenti par nos pères, ce pays que nous avons fabriqué, celui qui nous offre mille et une nuits de lectures, de connaissances et d’amours. Internet nous appartient, INTERNET MON AMOUR. Nous y sommes militants, mutants, mutilés invisibles et reproductibles comme dirait l’autre. Nous y sommes des millions. Et quand bien même les flics investissent les écoles publiques en uniforme, les artistes ex maoïstes-trotskystes étatisés déblatèrent sur nos chaînes publiques leurs droits et âmes à gagner 10000 fois plus que nous, pauvres publics, nous nous attacherons à offrir à notre territoire un ultime accès public et libre avant de le bousiller ensemble et si simplement. Nos armes sont plus puissantes que leurs uniformes. Notre ceinturon est celui de l’esprit, nos sifflets et cordons sont ceux de l’insurrection, nos galons ceux du transgenre, et notre tenue réglementaire celle du pirate qui s’infiltre dans les serveurs du tout puissant gouvernement et de ses copines les majors. STAIVE. Dégage de nos tuyaux. T’es un WESH. UN BOLOSSE.
L’hypothèse est éloignée du MOI qui partout se fissure. La nouvelle hypothèse est MUTANTE, celle de ceux qui s’organisent en toute affinité. Ceux qui ne veulent pas crever avant de programmer un vaste chantier, OPEN SOURCE, celui de l’extase de la culture promise. Cette seconde hypothèse tient la route, elle est possible. La destruction est possible. Ni un flic national, ni un ministre de gauche ou de droite, ni un artiste ayant 10000 droits et âmes de plus que MOI et TOI et les AUTRES avant même de crever, ni un MAJOR ou un SENIOR ne sait regarder son écran connecté et en comprendre les signes. Ils sont nuls, archis nuls. Gageons que mon fils de 8 années, avant même de savoir parfaitement écrire et lire, ennemi virtuel pressenti, réussisse à se protéger des dangers de l’Internet en France, qu’il parvienne à télécharger, à accéder librement à une culture qui le construirait et qu’il se désigne tout naturellement pour détruire tout ceci et en toute légitimité. Je l’instruirai. Je l’accompagnerai. JE SUIS TA MERE. Espérons ainsi que lui et ses copains aient quelques vélléités à programmer sous DOS, en C++, quelques aspirations à s’introduire d’un protocole à un autre, à naviguer d’un proxy à un autre, et quelques désirs légitimes et filiaux à casser un serveur menteur, un serveur ignorant, un serveur princier. Hackeur, tu le deviendras. Le réseau, tu le détruiras. Les données, tu les effaceras. Mutant parmi les mutants, tu le seras. TU ES MON FILS. On the screen.
Rappelons que la pensée a existé.
Certains se sont défenestrés, asphyxiés, de cette souffrance nietzschéenne, d’autres s’en sont allés, cancer au corps. Ils sont déjà morts. C’est con. Ils auraient été activement les pires ennemis du pouvoir ignorant. Ceux qui ont pressenti notre pays supplémentaire, Michel, Gilles, Félix, Jacques et les autres (ET TOI). Ceux qui ont perçu notre réseau Internet avant même qu’il n’apparaisse.
Ce n’est pas pour cette raison de la mortalité infligée, que nous devons ne pas leur écrire quelques derniers mots, leur dire qu’ils ont été de si grands précurseurs, de si merveilleux visionnaires, de si honorables pirates de la pensée. Leur écrire d’un cimetière à un autre, d’un rhizome à un autre, d’une opposition à une autre, que ce pays a existé, que la révolution de la perception s’est déroulée, que l’utopie s’est octroyée un corps nouveau, un corps mutant. Et leur livrer quelques aveux aussi, que nous n’avons pas réussi à les honorer, que nous avons échoué là où ils ont excellé, que la filiation s’est écroulée. Que nous avons honte simplement de ceci.

Nous devons détruire Internet avant que le pouvoir princier en arpente chaque recoin et en mesure l’intérêt, son intérêt, économique et politique. Avant que ce pays supplémentaire ne nous échappe totalement et que notre intérêt, celui de l’accès immense à la culture, celui de la circulation libre, insensée et possible de la pensée ne disparaisse à jamais.
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