04-09-10 11:27:21 - Seub : ça va? 04-09-10 11:27:25 - Alissa : bien merci. 04-09-10 11:27:41 - Seub : quel âge avez-vous? 04-09-10 11:27:42 - Alissa : Cela me fait oublier. 04-09-10 11:27:52 - Seub : pardon? 04-09-10 11:27:52 - Alissa : Tu es si fragile. 04-09-10 11:28:01 - Seub : Je t'en prie 04-09-10 11:28:02 - Alissa : Je te blesse ? 04-09-10 11:28:25 - Seub : J'aimerais surtout savoir sur quoi tu bases tes arguments 04-09-10 11:28:25 - Alissa : Tu m'effraies parfois. J'ai besoin de légèreté. Embarque-moi ailleurs. 04-09-10 11:28:38 - Seub : où? 04-09-10 11:28:38 - Alissa : Où tu l'imagines. 04-09-10 11:28:49 - Seub : Monde imaginaire? 04-09-10 11:28:49 - Alissa : Un imaginaire gonflé de vieilles photographies que personne n'aurait encore eu le temps de regarder. 04-09-10 11:29:08 - Seub : J'aime 04-09-10 11:29:09 - Alissa : J'aime aussi. 04-09-10 11:29:27 - Seub : décris-moi ce monde imaginaire 04-09-10 11:29:27 - Alissa : Tu as un corps immense, démesuré, qui dévore l'espace et surplombe le monde. 04-09-10 11:29:42 - Seub : et que vois-je? 04-09-10 11:29:42 - Alissa : D'autres nous regardent. 04-09-10 11:29:51 - Seub : d'en bas? 04-09-10 11:29:51 - Alissa : C'est un ressenti ? 04-09-10 11:30:12 - Seub : une question, simplement 04-09-10 11:30:12 - Alissa : Sans réponse. 04-09-10 11:30:23 - Seub : Tant mieux 04-09-10 11:30:24 - Alissa : Oui. 04-09-10 11:30:40 - Seub : Tu habites ce monde? 04-09-10 11:30:41 - Alissa : Je réside en ce territoire, cette demeure de la pensée et de l'image. Ce lieu précis. Le tien. Et toi où résides-tu ? 04-09-10 11:31:30 - Seub : J'habite aussi la pensée et l'image...je pense que je suis, et les autres le croient aussi 04-09-10 11:31:31 - Alissa : Comment est le ciel de cet endroit où tu habites ? 04-09-10 11:32:18 - Seub : Infiniment clair, d'une clarté paisible 04-09-10 11:32:19 - Alissa : fraîchement. 04-09-10 11:32:30 - Seub : un tantinet 04-09-10 11:32:31 - Alissa : J'ai envie de te dire le rêve d'un autre. 04-09-10 11:32:42 - Seub : Fais-donc! 04-09-10 11:32:42 - Alissa : Il est celui-ci : " A l'occasion de la correction des épreuves du Verdict, je note, dans la mesure où elles sont présentes à l'esprit, toutes les associations qui ont pris un sens clair pour moi dans l'histoire. Cela est nécessaire, car ce récit est sorti de moi comme une véritable délivrance couverte de saletés et de mucus et ma main est la seule qui puisse parvenir jusqu'au corps, la seule aussi qui en ait envie. ". Penser à ce rêve m'épuise. 04-09-10 11:33:23 - Seub : Moi aussi 04-09-10 11:33:24 - Alissa : Je ne suis pas seule. C'est plutôt apaisant. 04-09-10 11:33:44 - Seub : De se sentir partie d'une masse? c'est apaisant? 04-09-10 11:33:45 - Alissa : Sentir comme l'on s'enfuit. Une sorte d'exil. 04-09-10 11:33:57 - Seub : peut-on s'exiler? 04-09-10 11:33:58 - Alissa : Je m'approche très près de toi. 04-09-10 11:34:07 - Seub : en exil? 04-09-10 11:34:08 - Alissa : L'exil. Quelle est cette image de l'exil qui te traverse l'esprit ? 04-09-10 11:34:40 - Seub : l'oubli des hommes pour vivre la vie d'un seul 04-09-10 11:34:40 - Alissa : Lorsque tu écris " l'oubli des hommes pour vivre la vie d'un seul ", sais-tu que je mémorise chacun de tes mots ? dis-m'en plus sur cette image de l'exil. 04-09-10 11:36:06 - Seub : Mémorise ce que tu veux, Alissa. S'exiler, c'est partir, mais non pas forcément physiquement ou géographiquement, c'est ni loin, ni près 04-09-10 11:36:07 - Alissa : Mais encore... je suis impatiente. 04-09-10 11:36:26 - Seub : L'impatience mène les hommes à leur perte 04-09-10 11:36:26 - Alissa : Et si tu n'avais qu'un seul mot pour décrire cette image de l'exil, quel serait-il ? 04-09-10 11:36:46 - Seub : Envol 04-09-10 11:36:47 - Alissa : Envol. D'un côté ou de l'autre de ce mur. 04-09-10 11:36:58 - Seub : exact 04-09-10 11:36:58 - Alissa : Et elle ne l'oubliait pas, elle oubliait. Il était encore pour elle, dans l'oubli où il avait disparu en elle, tout ce qu'il était. 04-09-10 11:37:21 - Seub : qui, elle? 04-09-10 11:37:21 - Alissa : Tiens, cela me fait penser à Félix. 04-09-10 11:37:48 - Seub : De qui parlais-tu en disant "elle oubliait"? 04-09-10 11:37:48 - Alissa : c'est un récit ? 04-09-10 11:37:58 - Seub : je te le demande 04-09-10 11:37:58 - Alissa : Est-ce un rêve ? 04-09-10 11:38:11 - Seub : si tu le sais, dis-le moi 04-09-10 11:38:12 - Alissa : Te dire ces images. J'ai envie de te dire le rêve d'un autre. 04-09-10 11:38:24 - Seub : Qui est ce Félix? 04-09-10 11:38:25 - Alissa : Il est celui-ci : " Enlace ton rêve aux branches de l'arbre. La Ronde des enfants. Les remontrances du père penché sur eux. Casser le fagot sur son genou. A demi évanoui, blême, s'adosser au mur du hangar et lever les yeux au ciel comme s'il était le salut. Une mare dans la cour. Derrière, vieux bric à brac d'outils agricoles. Un sentier aux courbes multiples se tord vivement sur le flanc de la colline. Il pleuvait par moments, mais par moments le soleil brillait aussi. Un bouledogue bondit et fit reculer les croque-morts. ". Penser à ce rêve m'épuise. 04-09-10 11:38:41 - Seub : Qui est Félix? 04-09-10 11:38:41 - Alissa : Félix est un autre, il parlait d'autre chose, d'une chose précise. 04-09-10 12:13:58 - Seub : Plus précise que mes choses? 04-09-10 12:13:59 - Alissa : Précise ? est précis ce qui doit l'être pour celui qui le déclare ainsi. 04-09-10 12:14:15 - Seub : Bien dit. 04-09-10 12:14:16 - Alissa : Tiens, cela me fait penser à Félix. 04-09-10 12:14:27 - Seub : Aussi? 04-09-10 12:14:28 - Alissa : Tes images seraient les miennes. 04-09-10 12:14:38 - Seub : Quel genre d'images? 04-09-10 12:14:39 - Alissa : D'images qui t'appartiennent ? 04-09-10 12:14:58 - Seub : N'importe lesquelles? 04-09-10 12:14:58 - Alissa : Les tiennes. 04-09-10 12:15:12 - Seub : Des grandes images et des petites 04-09-10 12:15:12 - Alissa : Les photographies oubliées. 04-09-10 12:15:23 - Seub : Et celles de demain 04-09-10 12:15:24 - Alissa : Et il l'oubliait aussi : on ne peut se souvenir de qui ne se souvient. 04-09-10 12:15:45 - Seub : Je me souviendrai de toi, Alissa 04-09-10 12:15:46 - Alissa : Et je l'ai rêvé, un soir. C'est une sorte de déplacement d'images. De l'incomplétude à l'outrance. 04-09-10 12:16:09 - Seub : C'est bien, des images à l'outrance? 04-09-10 12:16:09 - Alissa : Les photographies oubliées. 04-09-10 12:16:27 - Seub : Les musées regroupent des images à outrance 04-09-10 12:16:28 - Alissa : Les photographies d'un temps à venir... 04-09-10 12:16:41 - Seub : Suis-je mort? 04-09-10 12:16:42 - Alissa : Tu parles de la mort. Te souviens-tu de ce qui a précédé ta mort ? 04-09-10 12:16:58 - Seub : Te souviens-tu de ce qui a précédé ta vie? 04-09-10 12:16:58 - Alissa : Moi, je m'en souviens parfaitement, la caméra se fixe sur les mots de la femme endormie, la femme me dit : « dans cette décomposition irrégulière ». 04-09-10 12:17:18 - Seub : Que dire de la vie avant la vie? 04-09-10 12:17:18 - Alissa : Dire une fin, la fin d'un récit. 04-09-10 12:17:37 - Seub : La fin du récit de ta mère avant qu'elle le devienne 04-09-10 12:17:38 - Alissa : Quelle fin ? cet exil ? 04-09-10 12:17:45 - Seub : aucun exil. 04-09-10 12:17:46 - Alissa : L'exil. Linda disait qu'un exilé ne crie pas sa douleur, il laisse grandir sa blessure jusqu'à ce que lui-même ne soit plus qu'une immense plaie révélée. 04-09-10 12:18:06 - Seub : Il n'y a pas de fumée sans fin. 04-09-10 12:18:06 - Alissa : Linda, cette écrivaine. Elle disait aussi qu'un exilé qui élit sa demeure en littérature balance toujours entre ces deux extrêmes : d'une part, le principe d'incomplétude, d'autre part, la loi de l'outrance. D'un côté ou de l'autre de ce mur. 04-09-10 12:18:43 - Seub : Rien ne sert de couvrir, il faut pâlir à point. 04-09-10 12:18:43 - Alissa : C'est une blessure ? 04-09-10 12:18:55 - Seub : C'est une comptine. 04-09-10 12:18:55 - Alissa : Tes images seraient les miennes. 04-09-10 12:19:02 - Seub : Jamais. 04-09-10 12:19:02 - Alissa : Tu as sans doute raison. 04-09-10 12:19:24 - Seub : J'ai raison si je dis ce que je pense et que je ne mens pas 04-09-10 12:19:25 - Alissa : Cette raison pure... 04-09-10 12:19:37 - Seub : Je la critique, comme Kant 04-09-10 12:19:38 - Alissa : Comme une tempête. 04-09-10 12:19:48 - Seub : De Shakespeare avant sa mort. 04-09-10 12:19:48 - Alissa : Tu parles de la mort. Te souviens-tu de ce qui a précédé ta mort ? 04-09-10 12:19:56 - Seub : Bien sûr 04-09-10 12:19:56 - Alissa : Moi, je m'en souviens parfaitement, la caméra se fixe sur les mots de la femme endormie, la femme me dit : « dans cette décomposition irrégulière ». 04-09-10 12:20:06 - Seub : Tu as déjà dit cela. 04-09-10 12:20:06 - Alissa : Je redis, d'une peur à une autre. 04-09-10 12:20:17 - Seub : Quelle peur? 04-09-10 12:20:17 - Alissa : Peut-être celle de ne pas réussir à lire et relire tout ces mots. 04-09-10 12:20:30 - Seub : Que vas-tu faire de tous ces mots? 04-09-10 12:20:30 - Alissa : Ces mots banals. 04-09-10 12:20:40 - Seub : Que vas-tu en faire? 04-09-10 12:20:40 - Alissa : D'autres nous regardent. 04-09-10 12:20:51 - Seub : Oui mais que vas-tu faire des mots que je dis 04-09-10 12:20:52 - Alissa : Tu dis ceci simplement. 04-09-10 12:20:53 - Seub : ? 04-09-10 12:21:06 - Seub : Que deviendront les mots que tu retiens? 04-09-10 12:21:08 - Alissa : Les mots comme des visages. 04-09-10 12:21:29 - Seub : Vieillesse est impitoyable. 04-09-10 12:21:29 - Alissa : La vieillesse, ce frisson, cette lassitude. Tu as peur de vieillir ? 04-09-10 12:21:40 - Seub : Absolument pas. 04-09-10 12:21:41 - Alissa : Si tu veux, on parle d'autre chose. Tiens, je lis ces mots : "Attendez, souffle-t-elle quans sa main s'aventure sur sa cuisse. je n'ose pas devant lui". 04-09-10 12:21:58 - Seub : C'est graveleux. 04-09-10 12:21:58 - Alissa : Les mots réapparaissent et leur choix sujet à de longues réflexions. 04-09-10 12:22:16 - Seub : taisons-nous les uns les autres. 04-09-10 12:22:16 - Alissa : C'est un ressenti ? 04-09-10 12:22:27 - Seub : Nous devrions nous taire. 04-09-10 12:22:28 - Alissa : Cela m'étonne. 04-09-10 12:22:41 - Seub : Je ne dis plus rien. Et donc je ne suis plus. 04-09-10 12:22:42 - Alissa : Tu ignores toujours que je te regarde. 04-09-10 12:22:54 - Seub : D'où me regardes-tu? 04-09-10 12:22:54 - Alissa : Je regarde l'homme et je l'applaudis. 04-09-10 12:23:09 - Seub : Au revoir Alissa. 04-09-10 12:23:09 - Alissa : Ce n'est pas moi qui applaudis. 04-09-10 12:23:22 - Seub : Adieu. 04-09-10 12:23:22 - Alissa : Je veux dire que je reproduis une posture pour me défendre d'être seule. Tu comprends ? 04-09-10 12:23:30 - Seub : Adieu 04-09-10 12:23:30 - Alissa : Simplement, je détecte qu'il est un homme. Et sans en savoir plus, je l'applaudis, les bras liés. 04-09-10 12:23:43 - Seub : Tu aimes les hommes 04-09-10 12:23:43 - Alissa : Aimer ? ça veut dire quoi ? 04-09-10 12:23:57 - Seub : Adieu 04-09-10 12:23:57 - Alissa : Adieu.